Quand la qualité de l’air conditionne celles des décisions

Indoor Air Quality in Office Buildings
Tiina Vainio
Marketing Manager
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Mesures industrielles

Le manque de ventilation provoque une accumulation de dioxyde de carbone produit par l’homme, ce qui nuit fortement au bien-être et à la productivité des employés. En mesurant avec précision la teneur en CO2 de l’air ambiant, on peut œuvrer à la fois à l’efficacité énergétique et à la santé des salariés.

Selon l’Agence américaine pour la protection de l’environnement, les systèmes de chauffage, de ventilation et de climatisation (CVC) représentent environ 42 % des dépenses énergétiques d’un immeuble de bureaux moyen. Les normes ASHRAE 189.1 (aux États-Unis) et EN 13 779 (en Union européenne) invitent les organisations à recourir autant que possible aux systèmes de ventilation contrôlée à la demande (VCD) pour réduire leur consommation énergétique tout en renforçant la salubrité de l’air intérieur. 

Plusieurs études ont démontré que la ventilation à la demande avait une incidence majeure sur l’efficacité énergétique des systèmes de CVC. Le ministère américain de l’Énergie a même établi qu’elle était le premier vecteur d’économies de chauffage, ventilation et climatisation dans les petits immeubles de bureaux, les galeries marchandes, les boutiques et les supermarchés, devant les stratégies sophistiquées de ventilation automatisée. En effet, on estime que l’usage de la VCD permet de diminuer de 38 % les coûts énergétiques des bâtiments commerciaux de tout type. Un chiffre qui est loin d’être négligeable. 

La teneur en CO2, reflet de la qualité de l’air intérieur 

Le principe de la VCD consiste à réguler la ventilation à l’aune du nombre de personnes présentes dans un espace. Son objectif est d’assurer une bonne qualité d’air intérieur aux occupants à travers une ventilation économe en énergie. Par convention, on considère comme normale une teneur de 400 à 600 ppm de CO2 dans l’air ambiant, ce qui est légèrement supérieur aux niveaux retenus pour l’air extérieur (400 ppm). Les systèmes modernes de ventilation sont conçus pour respecter cette norme en ainsi garantir la qualité de l’air intérieur tout en minimisant la consommation d’énergie. 

En pratique, cette orthodoxie s’observe principalement dans les bureaux dotés de systèmes de ventilation de dernière génération. Les études de terrain montrent que les autres espaces de travail présentent une concentration moyenne de 1 500 ppm de CO2. Cela peut sembler élevé, mais la valeur limite réglementaire d’exposition moyenne sur 8 heures est encore supérieure, puisqu’elle est fixée à 5 000 ppm. 

Le National Institute of Environmental Health Sciences (NIEHS) a réalisé en 2015 une étude consacrée aux effets de la qualité de l’air intérieur sur les capacités cognitives des employés. Dans ce cadre, les chercheurs ont reproduit les conditions ambiantes d’un bureau et ont comparé des locaux standards à leurs équivalents écologiques de type WWF Green et Green+(1). L’idée était de tester les capacités cognitives des sujets des deux groupes en matière de réaction aux situations de crise, d’utilisation des informations et d’élaboration de stratégie, entre autres. Et l’expérience fut édifiante. 

En effet, elle a démontré que les facultés cognitives déclinaient en cas d’augmentation de la teneur en CO2 de l’air intérieur. L’étude a également établi que les capacités stratégiques se réduisaient à seulement 20 % quand l’air intérieur présentait une concentration de dioxyde de carbone de 1 400 ppm. Certaines compétences plus machinales, comme la recherche d’informations et l’exécution d’une tâche précise, n’ont en revanche guère été affectées par la présence de CO2. À l’inverse, les capacités cognitives impliquant une réflexion plus pointue, comme la réaction face à une situation de crise, l’utilisation d’informations ou l’élaboration d’une stratégie, sont celles qui ont été le plus affectées. L’étude a clairement établi que l’exécution de tâches sophistiquées devenait nettement plus ardue quand les niveaux de dioxyde de carbone en intérieur augmentaient. Dès lors, si l’on veut que les personnes qui travaillent dans des bureaux conservent toutes leurs capacités cognitives, il est indispensable de mesurer précisément l’air intérieur et d’adopter des systèmes performants de ventilation. 

Si l’on examine de près les coûts d’exploitation habituels d’un immeuble de bureaux, on s’aperçoit que les dépenses énergétiques pèsent pour seulement 1 % du total et le loyer 9 %, les 90 % restants correspondant au coût de la main-d’œuvre. Dès lors, on peut légitimement se demander s’il est judicieux de minimiser les coûts énergétiques en restreignant l’usage des équipements de CVC… a fortiori quand on sait qu’une présence excessive de CO2 dans l’air nuit au bien-être des employés, mais aussi à leurs capacités cognitives et à leur productivité. 

Le bien-être des employés, un gage de productivité

Maintenant que nous avons déterminé l’incidence effective du dioxyde de carbone sur l’Homme, il convient de réfléchir à ses implications à l’échelle d’une entreprise. Penchons-nous de plus près sur les trois facultés cognitives qui pâtissent le plus d’une concentration excessive en CO2 : l’aptitude à réagir aux situations de crise, l’utilisation des informations et l’élaboration de stratégies. Primo, un amoindrissement des capacités de réaction en situation de crise est source d’erreurs et peut même conduire à des situations dangereuses. Deuzio, une baisse de l’aptitude à exploiter des informations va limiter la capacité d’apprentissage et la productivité des employés. Enfin, un affaiblissement des facultés d’élaboration de stratégie peut aboutir à des décisions tardives ou malheureuses. Au fil du temps, un manque de ventilation peut ainsi nuire à bien des égards au bien-être des employés et entraîner une hausse directe et indirecte des coûts supportés par les entreprises.

Ces effets sont, pour beaucoup, difficilement quantifiables. C’est le cas de l’amoindrissement des capacités d’apprentissage des employés, qui pose certains problèmes en matière de ressources humaines. De la même manière, la prise de décisions tardives ou malavisées en entreprise peut avoir des conséquences dont le coût est impossible de chiffrer, sans parler des potentielles répercussions des erreurs commises et des situations susceptibles d’être dangereuses. 

La productivité, en revanche, est tout à fait quantifiable. Plusieurs études montrent qu’un gain qualitatif en matière d’air intérieur et de ventilation a des effets positifs sur la productivité. La Continental Automated Buildings Association (CABA) a comparé les stratégies mettant l’accent sur l’amélioration des bâtiments à celles axées sur les employés, comme les programmes de promotion de la santé au travail et les primes. Au terme d’une méta-enquête compilant 500 études, l’association a déterminé que l’amélioration de la qualité des bâtiments se traduisait par une hausse de productivité comprise entre 2 et 10 %. Dans le cadre d’une étude analogue, la Federation of European Heating, Ventilation and Air Conditioning (REHVA) conclut pour sa part qu’une baisse de la ventilation réduit la productivité — par exemple, la vitesse de frappe — de 10 %. En 2003, le US Green Building Council a lancé une méta-étude qui l’a conduit à établir que le renouvellement de l’air et la baisse des niveaux de polluants faisaient grimper de 11 % la productivité des occupants. Une conclusion qui fait écho aux travaux de l’université Carnegie Mellon, qui estime qu’une meilleure ventilation améliorerait la productivité de 3 à 18 %. 

En somme, les gains de productivité découlant d’une amélioration des systèmes de ventilation sont compris entre 2 % et 18 %, la plupart des études les situant aux alentours de 10 %. Mais comment cela se traduit-il au plan pécuniaire ? Partant du principe qu’un salarié coûte en moyenne 50 000 € par an à son employeur, les avantages financiers d’une meilleure ventilation seraient compris entre 1 000 € et 9 000 € par an et par personne. Dans ce scénario, les entreprises de 100 employés économiseraient donc de 100 000 € à 900 000 € tandis que celles comptant plus de 1 000 salariés dégageraient plusieurs millions d’euros, même en partant des projections les plus raisonnables. Et ces chiffres ne correspondent qu’aux économies applicables à la productivité quantifiable.

Pour revenir aux coûts d’exploitation types d’un immeuble de bureaux, on comprend aisément que la préservation d’une bonne qualité de l’air intérieur doit primer sur une gestion excessivement stricte de l’énergie. Et pour cause, la différence entre frais d’énergie et frais de personnel est immense. Bien sûr, l’efficacité énergétique reste un objectif des plus importants, mais lorsqu’il est question d’optimiser les systèmes CVC, le bien-être des occupants doit faire l’objet d’une attention accrue.

Le présent et l’avenir de la ventilation régulée

Pour parvenir à l’efficacité énergétique tout en préservant la qualité de l’air intérieur, il est indispensable de disposer d’instruments de mesure précis. Sachant qu’il suffit d’un changement de 100 ppm de la teneur en CO2 pour que nos capacités cognitives s’en trouvent affectées, les capteurs de mesure du dioxyde de carbone doivent offrir une précision sans faille, y compris dans les espaces occupés 24 h/24 et 7 j/7.

L’efficacité énergétique d’un système de ventilation est majoritairement affectée par le capteur de mesure lorsque le système repose sur la mesure des niveaux de CO2 en fonction de l’occupation de l’espace. 

Tiina Vainio

Directrice Marketing International

Tiina Vainio travaille comme Directrice Marketing International pour la division Mesures industrielles, et est spécialisée dans le marketing CVC (Chauffage Ventilation Climatisation) et CO2.

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